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Droit d’auteur : Déception chez les artistes interprètes après la proposition de la Commission européenne

oettinger-image-commentedLa Commission européenne a publié mercredi 13 septembre 2016 sa proposition de directive sur le droit d’auteur dans le marché unique numérique. Cette communication est intervenue le même jour que le discours du président Juncker sur l’état de l’Union 2016.

Les déclarations prononcées à cette occasion par les représentants de la Commission ne manquent pas d’ambition, voire d’emphase. Ainsi, on aime entendre Jean-Claude Juncker affirmer : « Les artistes et les créateurs sont les joyaux de l’Europe. La création de contenu n’est pas un passe-temps. C’est un métier. Et elle fait partie de notre culture européenne ».

Le communiqué de presse de la Commission évoque « un mécanisme destiné à aider les auteurs et les artistes interprètes à obtenir une rémunération juste lorsqu’ils négocient avec les producteurs et les éditeurs ».

Tibor Navracsics, commissaire européen en charge de l’éducation, la culture, la jeunesse et des sports affirme avec justesse que les auteurs et les artistes interprètes « méritent de recevoir leur juste part des revenus générés par leurs créations ».

On était donc en droit d’attendre que la proposition de directive traduise les ambitions si hardiment affichées par MM. Juncker, Oettinger, Ansip ou Navracsics. En pratique, il y a loin de la parole aux actes et les artistes interprètes sont malheureusement les grands oubliés de ce texte.

Certes, les articles 14 à 16 du titre IV, chapitre 3, apportent des éléments de réponse aux demandes des créateurs, en prévoyant des règles en matière de transparence et la possibilité d’introduire une requête pour corriger a posteriori un contrat notoirement inéquitable au regard des revenus générés. Pour autant, ces articles ne répondent pas aux attentes de l’immense majorité des artistes interprètes, qui demandent une garantie de rémunération chaque fois qu’un titre est téléchargé ou écouté en streaming depuis une plateforme de type Spotify, Apple Music ou Netflix.

De toute évidence, ces règles n’ont été pensées que pour les auteurs et les artistes principaux, comme l’attestent les références à une « contribution significative », une « charge administrative […] disproportionnée par rapport aux revenus générés » ou une rémunération contractuelle « disproportionnellement faible » comparée à l’ensemble des revenus issus de l’exploitation de l’œuvre.

Même pour les quelques artistes de renom susceptibles de bénéficier de ces nouvelles règles, le mécanisme proposé demeure d’une portée très limitée. En effet, non seulement il dépend largement des conditions de sa transposition en droit national et de son interprétation, mais plus généralement, il repose sur le postulat que les contrats d’artistes sont, par nature, justes. Ainsi, c’est à l’artiste qu’incombent la charge de la preuve et l’obligation d’en passer par des procédures complexes, longues, coûteuses et incertaines pour tenter de corriger une situation inéquitable. Au surplus, vu la situation fragile dans laquelle se trouvent la plupart des artistes, peu d’entre eux prendront le risque de s’aliéner leur producteur en engageant à son encontre une telle procédure.

La proposition de la coalition Fair Internet constitue la solution la plus réaliste et efficace pour rendre l’Internet équitable pour l’ensemble des artistes interprètes européens, en prévoyant un droit à rémunération incessible, perçu auprès des plateformes et géré collectivement.

La Campagne Fair Internet – à laquelle la FIM est associée – va se poursuivre auprès du Parlement européen afin de corriger les insuffisances du texte de la Commission, y compris en ce qui concerne la formulation des articles 14 à 16.

 

Source: Fédération Internationale des Musiciens (FIM)